"Acteurs Publics" le 18/09/2017

Le scénario présenté par le gouvernement pour compenser la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les fonctionnaires “n’est pas acceptable en l’état”, estime le secrétaire général de l’Unsa Fonction publique, Luc Farré. Le syndicaliste juge aussi que le Grand forum des services publics doit “faire aller de l’avant” la fonction publique et le service public.


L’Unsa, aux côtés des 8 autres organisations syndicales représentatives du secteur public, a acté le principe d’une journée d’action des agents publics pour le 10 octobre prochain, soit le jour même du “rendez-vous salarial” promis par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Pourquoi vous êtes-vous joint à cet appel à la mobilisation ?

Qu’il s’agisse du gel de la valeur du point d’indice, du rétablissement du jour de carence ou du scénario proposé pour compenser la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), depuis l’arrivée du gouvernement, les annonces à destination des agents publics sont toutes négatives et contre-productives. Or les agents publics, titulaires comme contractuels, ont besoin de reconnaissance. Il faut aujourd’hui dépasser les discours, faits au nom du service public, pour les concrétiser dans les actes. Et ainsi, que les mesures prises soient positives et bénéfiques pour les agents publics. Cette pleine considération passe entre autres par une reconnaissance au niveau du pouvoir d’achat.

Peut-on dire que le scénario de compensation de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les fonctionnaires présenté par le gouvernement mercredi 13 septembre a été “la goutte d’eau qui a fait déborder le vase” ?

Je ne dirai pas que cela a été l’élément déterminant de notre appel à la mobilisation aux côtés des autres organisations syndicales du secteur public, mais c’est un élément supplémentaire qui contribue à notre mécontentement. Nous attendions avec intérêt cette réunion et les propositions du gouvernement [suppression de la cotisation exceptionnelle de solidarité de 1 % pour les fonctionnaires et mise en place d’une indemnité compensatoire, ndlr]. Mais ce que le ministère de l’Action et des Comptes publics nous a présenté lors de la réunion ne permet pas pour l’instant de dire que les fonctionnaires bénéficieront d’une amélioration de leur pouvoir achat, ni même peut-être que la compensation de la hausse de CSG soit réelle. Les éléments qui nous ont été présentés [cliquez ici pour les consulter] ne sont pas acceptables et vont à l’encontre des promesses faites par le Président dans sa lettre aux agents publics, où il promettait, comme pour les salariés du secteur privé, une hausse du pouvoir d’achat en contrepartie de la hausse de CSG.

Quelles auraient pu être les alternatives au scénario du gouvernement ?

Il y a d’autres façons de faire, notamment en agissant sur le volet indiciaire, sur le nombre de points d’indice ou sur leur valeur. C’est un scénario de compensation que nous avons toujours en tête et que l’on continuera d’évoquer d’ici le rendez-vous salarial du 10 octobre. Mais je ne désespère pas que les choses puissent évoluer d’ici là. Dans tous les cas, le scénario de compensation de la CSG devra être pérenne et non dégressif. Ce que nous souhaitons, c’est que les agents titulaires comme les contractuels soient concernés par une hausse de leur pouvoir d’achat et, a minima, une compensation à l’euro près de la hausse de CSG.

Dans un tweet publié vendredi 15 septembre, le ministre Gérald Darmanin a annoncé la signature de plusieurs décrets d’application du protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PCCR). Ils n’ont malgré tout toujours pas été publiés au Journal officiel. Quelle fut votre réaction à l’annonce de cette signature ?

C’était une exigence de l’Unsa et nos interventions répétées ont été utiles. Un certain nombre de décrets de transposition du protocole ont en effet été signés*, mais ça ne veut pas dire qu’ils sont encore publiés. Il reste encore un certain nombre de corps, comme les attachés d’administration de la fonction publique hospitalière, qui doivent encore attendre la signature des textes les concernant. C’est un geste positif du gouvernement. Reste à savoir comment le protocole sera appliqué dans son ensemble. Lors du Conseil commun de la fonction publique, le 10 juillet dernier, le ministre de l’Action et des Comptes publics avait indiqué que “la situation des finances publiques nous oblige à nous interroger sur le calendrier de mise en œuvre du protocole et de l’étalement de sa montée en charge” et avait précisé que ce serait un sujet de discussion. De notre côté, nous continuons d’exiger le respect du calendrier d’application telle qu’elle est prévue.

Début septembre, lors de la réunion de concertation sur les modalités d’organisation du Grand forum des services publics – nouveau nom des états généraux du service public –, les organisations syndicales du secteur public reprochaient au gouvernement d’occulter de cette consultation les missions du service public. Qu’attendez-vous de la nouvelle réunion prévue sur le sujet mardi 19 septembre entre les syndicats de fonctionnaires et le ministre Gérald Darmanin ?

La méthode doit être très claire. Ce que l’on nous a présenté ne correspondait ni à notre demande ni aux propos de Gérald Darmanin dans sa lettre de juillet au sujet des états généraux du service public. Nous nous sommes étonnés de l’absence d’un volet attendu sur l’évolution des missions de la fonction publique et des services publics en fonction des besoins de la population. La méthode doit aujourd’hui être précisée, pour connaître la finalité exacte et le traitement qui sera fait des réponses récoltées. Il ne faut pas que l’on utilise cette consultation pour dire quelles missions ou quels services publics seront concernés par une diminution d’effectifs. Au contraire, elle doit servir à engager une réflexion plus large dans le cadre du dialogue social pour faire aller de l’avant la fonction publique et ce par un large débat autour des missions de service public où les agents comme les usagers seraient consultés.

Lors de son discours à l’occasion de la Conférence nationale des territoires, le 17 juillet dernier, le chef de l’État a fait part de son souhait de mettre en place une gestion différenciée des trois fonctions publiques [État, territoriale et hospitalière, ndlr], en proposant notamment une différenciation du point d’indice entre les versants. Une proposition qui n’a toujours pas été précisée. Quelles pourraient être les conséquences d’un tel dispositif ?

J’espère que cette annonce ne verra jamais le jour, ce serait sinon une erreur très très grave pour notre pays et pour les agents publics. Bien plus que des conséquences sur la mobilité entre les trois versants, la décorrélation de la gestion du point d’indice pourrait remettre en cause le statut même des fonctionnaires, notamment en impactant le principe d’égalité entre les agents de la fonction publique d’État, de la territoriale et de l’hospitalière.

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